Le coup de gueule de la rédaction

Erreurs géographiques, confusions d’appellations, approximations… Sur ces deux petits encadrés, les fautes sont nombreuses. Pourtant, l’ouvrage est publié par un grand éditeur et s’est très bien vendu sur le marché. Parlons Crus s’hérisse sur ces négligences qui dévalorisent notre métier.

Voilà ce que l’on peut trouver dans des livres sur le vin, et c’est inadmissible !
Voilà comment de gros éditeurs considèrent leurs lecteurs : suffisamment inattentifs pour ne pas voir que Cornas et Corbières sont deux noms différents et, de fait, deux appellations distinctes. La première se situe dans le vignoble de la vallée du Rhône alors que la seconde se trouve plus au sud, en Languedoc-Roussillon. Seulement 350 kilomètres de distance, si peu !

Et "Côte de Beaune" comme sous-région du vignoble de la vallée du Rhône alors que c’est en Bourgogne. La vallée du Rhône est, elle, divisée en deux : la partie méridionale au sud et la partie septentrionale au nord.

Dans une liste par ordre alphabétique, c'est proche.
Sur une carte de France, beaucoup moins.

On s’étonne de voir l’intelligence artificielle nous remplacer mais que faisons-nous ?
Un travail bâclé, des informations erronées, pas de vérification ni de correction, des erreurs de maquettage…
Cela s’explique malheureusement assez facilement, les éditeurs ne payent pas correctement ce type de travail fastidieux et chronophage.

Le poids des mots, le choc des fautes à gogo

Et si le poids des mots ne suffit pas, regardons un peu les chiffres : le vignoble du Rhône s’étend sur environ 70.000 hectares dont 65.000 sur la partie méridionale (sud) et seulement 5.000 sur la partie septentrionale (nord). Crozes-Hermitage (1.800 ha) est la plus grande appellation du Rhône nord alors que Cornas, qui affiche selon ce guide une surface deux fois plus grande que l’ensemble de la sous-région, est en fait l’une des plus petites (150 ha).

Pour ceux qui préfèrent les images aux textes (et qui auraient raison après ce que l’on vient de lire), ne vous fiez pas non plus aux couleurs des vins produits. À Cornas, le vin est rouge et il n’est fait que de syrah. Les trois couleurs dessinées ici correspondent aux vins produits en Corbières, tout comme le reste des informations.

Dans un milieu un peu élitiste où l’on prétend qu’il faut avoir des connaissances pour savoir si le vin est bon, il est bien désolant de voir à quel point transmettre est difficile. Il faut que cela change si nous voulons que les consommateurs, amateurs et lecteurs continuent à s’intéresser à notre culture.

On recense presque 500 AOC en France dont plus de 350 sont des appellations viticoles pour seulement une cinquantaine de fromages.
Et sans parler de simplifier un système compliqué, ayons au moins à cœur de raconter le vin correctement. Amenons nos lecteurs dans le vignoble.

Retour aux sources

Laissez-moi donc vous raconter Cornas et Crozes-Hermitage…
Sur la rive droite du Rhône, il est une petite appellation suspendue sur des coteaux abrupts découpés en terrasses. La syrah a conquis son sol de granit où elle règne en maître. Elle s’appelle Cornas. Son vin est rouge, aux arômes marqués et au caractère bien trempé. C’est un ardéchois.
Si Cornas représente l’unité, en face, sur l’autre rive du Rhône, s’allonge un vignoble au doux relief où marsanne et roussanne viennent éclairer les vignes de syrah. Nous sommes en Crozes-Hermitage et ici c’est la diversité qui parle. Diversité des terroirs, façonnés par les mouvements des rivières et du fleuve. Diversité des vins qui peuvent être blancs, rouges, souples, tanniques, fruités, puissants…

Ces deux images m’ont contrarié, d’abord parce que j’aime croire les livres. Je lis pour apprendre, comprendre et pouvoir transmettre. Je lis tous les jours, je cherche, je compare, je réfléchis pour essayer d’écrire au mieux. Ensuite parce que j’ai travaillé pour ces grands éditeurs qui publient des livres sur le vin tous les deux jours sans trop se soucier de leur contenu.

Partage et convivialité

Et puis Cornas, c’est chez moi, c’est mon histoire. C’est le vin qu’ouvre mon père le dimanche pour accompagner le bon repas que ma mère nous prépare. C’est le partage et l’amour d’un repas dans ma famille. Ce sont des débats longs et des éclats de voix pour simplement dire que le vin est très bon.

D’accord, je peux accepter qu’on se trompe sur des chiffres, des noms, des couleurs, tant qu’on est capable de se rappeler que le vin rassemble, qu’il crée des moments et des émotions qui sont à la portée de tous.

Sur Parlons Crus, on ne publie pas tous les jours mais nous faisons de notre mieux pour écrire ce que nous aimons lire.