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“Anecdotes et cocasseries à partager sans modération.”

Le vin, son histoire et sa culture.

Le sacrifice de la rose

Par Loïc Le Métayer, publié le 11/08/2023

Parfois, les plantes s’entraident de bonne volonté. Parfois, l’homme ne leur laisse pas le choix. Quitte à sacrifier l’une pour l’autre, surtout s'il s’agit de sauver son pinard.

Ça ne s’arrête pas aux plantes d’ailleurs. Regardez les canaris… En cage dans un salon, c’est joli (et ça casse les oreilles des voisins). Ce n’est déjà pas très charitable, mais jadis on leur faisait pire.
Les mineurs (ceux qui vont dans les mines de charbon, pas les mini-adultes qui n’ont pas encore le droit de boire) en amenaient avec eux pour faire office de signal d’alarme. Lorsqu’on creuse la roche, des gaz s’échappent, dont certains dangereux et inodores, comme le monoxyde de carbone. Si l’air en contient trop, un humain adulte, même costaud comme un mineur, peut tomber dans les vapes et mourir. Le canari, qui est loin d’être costaud comme un mineur, y succombera avant que le taux de gaz ne soit trop élevé. Alors dès qu’on n’entend plus le petit piaf crier régulièrement, on s’affole et on sort de là fissa.

Voir des champs de vignes avec un rosier au bout de chaque rangée, c’est très pittoresque. Mais c’est aussi cruel que d’emmener un canari dans une mine !

C'est joli et bien moins bruyant qu'un canari.
© DR

Les vignerons ne les mettent pas là que pour l’esthétique mais plutôt pour éviter les coups de grisou* sur les récoltes. En effet, les rosiers sont très sensibles à certaines moisissures ou maladies qui attaquent aussi les vignes, comme l’oïdium ou le mildiou par exemple. Planter un rosier en début de rang c’est un peu comme poster quelqu’un pour faire le guet. Dès les premiers signes de moisissure sur les rosiers, on saura qu’il faut traiter les vignes au plus vite, parce qu’elles ne vont pas tarder à y passer.

* Évènement violent, choc. L’expression vient d’un autre gaz dangereux qu’on rencontre dans les mines : le grisou. Très inflammable, il peut provoquer de dangereuses explosions, les "coups de grisou".

On dit aussi que les rosiers étaient autrefois plantés aux extrémités des rangs comme point de repère visuel, afin que les chevaux (ou parfois les bœufs) de labour sachent à quel moment faire demi-tour. En plus, un rosier, ça pique, alors le bestiau le contournera sans s’y frotter. On est sûr qu’il n’abîmera pas le dernier pied de vigne de la rangée.
Quand un visiteur demande pourquoi il y a autant de jolis rosiers sur la plantation, c’est toujours plus glamour à raconter que ces histoires de sacrifice et de moisissures…