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“Anecdotes et cocasseries à partager sans modération.”

Le vin, son histoire et sa culture.

Cent vins sains pour la saint Vincent.

Par Loïc Le Métayer, mis à jour le 01/02/2023 Publié le 01/02/2023

La saint Vincent, c’est la tournée du patron. En quelque sorte. Le 22 janvier, le monde du vin est célébration (on dirait "en ébullition" s’il ce n'était que la Champagne).

Il fête son protecteur à grands renforts de costumes traditionnels et de bonne bouffe… accompagnés de bon pinard, forcément.

Aujourd’hui, il y a des saintes et des saints protecteurs pour plein de professions, comme les acteurs ou les diplomates. Et il y en a aussi pour un peu tous les évènements ou activités de la vie : de saint Valentin pour les amoureux à saint Raymond pour les véliplanchistes. Même les cruciverbistes ont droit à leur saint Laurent. Mais ça n’a pas toujours été le cas : les saints patrons des catholiques et des orthodoxes chrétiens ne sont apparus que vers la fin du Moyen Âge.
Au 17ème siècle, fatigués de prier saint Fiacre (patron des jardiniers) ou sainte Rita (patronne des causes perdues) après un épisode de grêle, les vignerons ont décidé qu’ils avaient besoin d’un saint patron rien qu’à eux. Ils choisirent saint Vincent, un martyr chrétien mort vers 300 après J.-C., qui n’avait a priori aucun rapport avec la vigne.
Pourquoi ? Ce n’est pas très clair…

Peut-être bien que ça vient d’un jeu de mots fait par un vigneron qui a oublié de cracher pendant une dégust : Vincent… vin cent… cent vins… un vin c’est déjà super, alors cent !
Ou alors c’était à la messe, quand le prêtre lui a tendu un calice plein de vin et a repris les paroles de Jésus : "Buvez, ceci est mon sang". Vin qui, en fait, est du sang… vin-sang… Vincent…
Un peu tiré par les cheveux, mais pourquoi pas.

L’autre théorie, c’est celle de la date : certains manuscrits du Moyen-Âge mentionnent le 22 janvier comme première taille de l’année pour les pieds de vigne. Or le 22 janvier, à qui envoie-t-on ses vœux ? Exactement : à Vincent Cassel si on aime le cinéma, à Vincent Van Gogh si on préfère la peinture (et qu’on est médium). Oh ! Et puis en plus, Vincent, ça commence par "vin" !
Parfait, les deux hypothèses ne sont donc pas contradictoires.

A-ha-ha, très drôle de se moquer
des gens qui sont morts. Très classe !
(autoportrait de Vincent Van Gogh)


D’ailleurs, on ne sait pas non plus qui a décidé de choisir ce saint plutôt qu’un autre, mais cela pourrait avoir un lien avec le moine bénédictin dom Ruinart. Ce nom vous dit probablement quelque chose si vous êtes fan de boissons à bulles*, et pour cause : il a collaboré avec dom Pérignon**, un autre moine, œnologue avant l’heure, qui selon la légende aurait découvert les secrets de l’effervescence… alors qu’en fait, à l’époque, on essayait plutôt d’éviter la prise de mousse.
Dom Ruinart était martyrologue - métier un chouilla plus rare aujourd’hui qu’au Moyen-Age - et a notamment écrit une des plus célèbres passions*** de saint Vincent.
Alors si ça se trouve…

* Ruinart est une maison de champagne.
** Qui a lui aussi donné son nom à une célèbre maison champenoise.
*** Récits de l’exécution d’un martyr. (Petit tuyau pour votre prochaine partie endiablée de Trivial Pursuit avec votre tante Jeanne qui est prof de français : seule la Passion de Jésus prend une majuscule, et "saint" ne prend de majuscule que quand il est attaché avec un tiret.)
Carte postale tirée d’un tableau d’Armand Guery,
figurant dom Pérignon. (Le moine, pas la bouteille !)


Une des dernières hypothèses sur le sujet, c’est que ce patronage viendrait de la basilique de l’abbaye de Saint-Germain-des-Prés, à Paris. Lors de sa consécration, en 558, elle s’appelait Sainte-Croix-Saint-Vincent. Comme souvent en France, les moines avaient leurs propres vignes et s’occupaient des vignobles alentours. Au moment de faire une petite prière pour le bien-être de la vigne, c’est logiquement saint Vincent qu’ils auraient invoqué. Et cette habitude se serait peu à peu propagée dans les autres monastères du pays.
 

Quelle que soit la théorie que vous préférez, maintenant vous le savez : le 22 janvier, le vin est en fête.
L’année prochaine, allez donc faire un tour en Bourgogne, à Bordeaux ou à Cahors pour célébrer la Saint-Vincent Tournante. Avec un peu de chance, vous arriverez peut-être à vous faire introniser par une confrérie bachique.